PAR LE DOCTEUR STÉPHANE CASCUA, MÉDECIN ET TRAUMATOLOGUE DU SPORT. ILLUSTRATIONS MATHIEU PINT
La tête de l’humérus, le sommet de l’os du bras, est recouverte de tendons. Ils s’y accrochent puis s’orientent vers l’omoplate à la manière de cheveux bien peignés ; on les appelle la « coiffe des rotateurs ». À l’autre extrémité, ils rejoignent des muscles qui s’accrochent sur l’omoplate.
Tendinite de l’épaule

Quand ces derniers se contractent, ils fixent la tête de l’humérus dans son logement sur l’omoplate. Ils créent ainsi un centre de rotation et les gros muscles peuvent entrer en action pour monter le bras ou le faire tourner. Ils sont recouverts par un bec osseux provenant de l’omoplate appelé acromion. Lorsque la coiffe des rotateurs fonctionne mal, la tête de l’humérus n’est pas fixe, elle pistonne vers le haut quand vous montez le bras. Les tendons viennent cogner la voûte formée par l’acromion et ils se font raboter. Un cercle vicieux commence… les tendons s’usent, deviennent moins efficaces, la tête humérale pistonne vers le haut et les tendons s’usent encore plus. La kinésithérapie et l’autorééducation ont pour mission de restaurer un fonctionnement harmonieux afin de rompre cet emballement lésionnel.
EXERCICE 1 : LE PISTON VERS LE BAS !
Penchez-vous légèrement en avant. En vous décontractant, laissez tomber le bras. Lentement, faites des petites rotations. Après quelques séances, essayez de pousser vers le bas avec votre main. Vous pouvez adopter la position du chevalier servant pour écraser et imprimer de petite rotation à un ballon posé au sol. Faites ce geste tous les jours pendant 1 à 3 minutes. Ce mouvement travaille votre relâchement et mobilise vos tissus. Il a pour objectif d’ouvrir l’espace entre la voute osseuse et la tête humérale afin de libérer le passage de vos tendons. Grâce à l’«exercice du ballon écrasé », vos muscles abaisseurs gagnent en force et en coordination.
EXERCICE 2 : CENTRAGE DE LA TÊTE
Prenez un haltère léger ou une bouteille d’eau plus ou moins remplie. Avec vos coudes fléchis, faites des petits cercles de 20centimètres de diamètre en montant légèrement le coude en prenant soin qu’il reste bien en dessous de l’épaule. Trouvez et faites évoluer la charge afin que vous puissiez réaliser une trentaine de rotations dans un sens et dans l’autre, matin et soir. Ce mouvement permet de renforcer les muscles de la coiffe des rotateurs et mieux synchroniser leurs contractions. Ils deviennent plus puissants et plus coordonnés. Ils fixent au mieux le centre de rotation de l’épaule. Notez que l’élévation du bras est modérée et ne provoque pas de frottements tendineux sur la voute osseuse. Les muscles pectoraux et dorsaux sont les principaux abaisseurs de l’humérus. Ils tirent vers le bas le sommet de l’humérus alors que le deltoïde élève la portion basse. Si tous ces muscles travaillent de concert, ils réalisent un effet levier qui permet de monter et descendre le bras sans écraser la coiffe des rotateurs.
EXERCICE 3 : « SALUTATION »
Jambes légèrement fléchies, penchez-vous en avant en conservant le bas du dos bien droit. Laissez tomber les bras à la verticale puis écartez-les à 45 degrés. Montez votre membre supérieur lentement et descendez-le doucement. Réalisez ce mouvement 20 à 30 fois. Quand l’exercice devient trop facile, saisissez un petit haltère ou une bouteille d’eau minérale dont vous augmenterez progressivement le contenu. En position haute le coude est fléchi à 90 degrés non loin de votre oreille et votre main se place au contact du sommet de votre crâne. Le plus souvent, grâce à cette trajectoire, votre lésion tendineuse ne frotte plus sur les reliefs osseux de l’omoplate mais passe sous un ligament plus souple, on parle de «voie de passage ». Pour briller en société, sachez qu’il s’agit très probablement du secteur de mobilité adopté par nos ancêtres arboricoles lorsqu’ils se balançaient de branches de branches. Ce mouvement sollicite le deltoïde et le grand dorsal. Vous l’avez compris, à eux deux, ils provoquent une bascule de l’humérus : le premier fait monter le bras, le second tire la tête vers le bas et évite les frottements tendineux.
EXERCICE 4 : LE MONTÉ DE BALLON
Écrasez un ballon sur le mur et faites le monter quitte à ce qu’il glisse un peu vers votre avant-bras. Redescendez lentement. Réalisez ce mouvement 10 à 40fois, matin et soir. L’ascension de la main reproduit le geste de l’armé propre au sport de lancer et de raquette, et optimise sa coordination protectrice. La descente lente du bras vous permet aussi d’améliorer vos interactions musculaires lors du freinage du smash ou du lancer. Le contrôle de ce mouvement est essentiel pour éviter que la tête humérale emportée par son élan ne vienne cogner les reliefs osseux. De surcroît, au cours de cet exercice, un côté du tendon de la coiffe est emmené par l’humérus alors que son muscle tire dans l’autre sens. Pratiquées sur le terrain, à vitesse élevée et en excès, ces contraintes de fin de geste provoquent des tendinites. En revanche, programmées progressivement et avec modération, ces tractions tissulaires assurent une adaptation et un renforcement tendineux. On parle de préparation ou de rééducation «excentrique ».
Là encore, vous associez élévation du membre supérieur grâce au deltoïde et abaissement de la tête par contraction des pectoraux. Les tendons ne frottent plus. De surcroît, l’instabilité du ballon peaufine la coordination de la coiffe des rotateurs et le centrage de la tête de l’humérus. Cette posture ressemble à celle de l’armé dans les sports de lancer et de raquettes. De fait, vous améliorez les interactions musculaires nécessaires à l’obtention d’un geste indolore et efficace.